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Il a vingt-sept ans. Il vit avec des douleurs chroniques depuis un moment déjà. Il est venu tard au cirque, à vingt ans et par hasard. En cherchant un petit boulot. Un bac raté  et puis un recrutement avec une formation express comme animateur cirque / acrobate pour un club de vacances. En cinq mois il faut alors savoir jongler, faire un numéro de trapèze ballant, un peu d’acrobatie au sol, du main à main et du trampoline. Un peu de tout. Cinq mois de formation intense. Neuf mois de travail tout aussi intense. Le corps va encaisser, résister, puis se blesse. Une école professionnelle “sur le tard”, deux ans dont un avec une blessure. Il travaille comme artiste de cirque, pour des événements, des villes, des parades de rues. Il est polyvalent, s'essaie à plein de choses. Le rythme se fait au fil des saisons et il ne travaille pas cinq mois sur douze. 

ll parle de cette “fragilité de santé”, d’un “stress émotionnel” qui est souvent difficile à gérer. Un stress lié au travail, entre autres, une pression subie en permanence, la peur de ne pas bien faire et une volonté “d’être sur tous les fronts”.  Il est très sollicité, a du mal à refuser, s’organise comme il peut. Tournées, événementiels, spectacles différents, trouver du temps pour s’entraîner un peu, se préparer. Sans compter les charges familiales. Mais comment refuser des “bons contrats”, quand les résidences sont payées, même si ça tourne beaucoup… C’est peut-être un peu trop de tout ça qui provoque un accident. Un agrès qu’il connaît peu, trop de fatigue, pas assez de force, “j’ai lâché”, explique-t-il. “C’est pas mon genre de me lancer comme ça dans des trucs que je ne maîtrise pas et là je sais pas pourquoi je l'ai fait. Je pense que ça a buggé dans mon cerveau parce qu'il y avait trop de choses et que ça saturait trop”. Les vertèbres sont touchées. Des séquelles neurologiques nombreuses. Heureusement, la compagnie pour laquelle il travaille à ce moment-là le soutient, l’aide dans ses démarches. Mais la rééducation reste un chemin solitaire.  Il se bat seul pour guérir. Il sera moins seul à la seconde blessure. Sur une route, il chute sur la nuque. Les cervicales et l’épaule sont à nouveau touchées. Nouveaux examens, nouvelle opération. Depuis, il vit avec, on lui a peut-être diagnostiqué un syndrome d’hyperlaxité. Il essaie de faire tous les jours ce qu’on lui a recommandé, une routine, de la proprioception, des élastiques. Les médecins, il n’en parle pas trop, sa vision en est assez négative, il est en conflit avec la médecine du  travail depuis que quelqu’un l’a déclaré inapte à cause de ses blessures. Il dit avoir une obsession pour le corps, pour l’entraînement, souvent, tout le temps. Un besoin physique de s’entraîner avec les autres. “Je suis flingué” répète-t-il souvent, mais il continue.

Pour guérir il a exploré autre chose, le Feldenkrais mais il déplore que ça ne soit pas pris en charge par la sécurité sociale. Ce sont des savoirs qui s’accumulent. Un plaisir fatiguant dit-il, “c'est pas une question de vie ou de mort là mais quand même c'est des questions de de douleurs assez fortes et en même temps il faut bien faire, bien faire le show, être fort, bien faire le truc être dans le timing, être avec les autres et c'est un plaisir aussi mais du coup voilà c'est c'est un plaisir fatiguant.”, termine-t-il. 

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