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Un manifeste pour la santé en danse

Prendre soin

Ce qu’on fait à soi et ce qu’on fait aux autres

Prendre soin, c’est avant tout réfléchir aux interactions entre les différents acteur.rice.s du secteur chorégraphique à différents niveaux et faire en sorte que la santé fasse partie de nos pratiques partagées. C’est nourrir son regard pour porter attention à soi et aux autres. Prendre soin, c’est aussi

incorporer différentes pratiques corporelles, genres, formes, sortir des normes. Prendre soin c’est regarder autour de soi. Le cadre de travail, bien sûr, mais aussi ce que les chercheur.e.s anglo-saxons nomment le “motivational climate” que nous pourrions traduire comme l’ensemble des éléments qui construisent un rapport bienveillant à son activité, dans le cadre de l’école ou d’une compagnie. On sait aujourd’hui l’impact considérable d’un climat de travail “positif” sur l’incidence de blessures mais aussi sur des phénomènes tels que le surentraînement, le burn out ou la perte de motivation.

Prendre soin, c’est donc déplacer les enjeux d’excellence qui individualisent les danseurs et les enferment dans un univers compétitif. Prendre soin, c’est mettre à distance la “passion” pour un métier qui, s’il elle est un réel moteur créatif, peut aussi conduire à des comportements délétères. Prendre soin, c’est faire prendre conscience de tous ces enjeux aux écoles, au réseau de production et de diffusion, aux employeurs, aux institutions, mais aussi aux danseur.euse.s eux/elles même. Il s’agit alors de revoir nos attentes, de déplacer le regard, d’affirmer que la santé des danseur.euse.s importe plus que tout le reste. De l’intégration des pratiques somatiques au recours au soin, du temps passé à prendre conscience de ses problèmes et limites au temps passé à se reposer et récupérer, nombreuses sont les habitudes à intégrer à son quotidien. Développer cette capacité, c’est sans doute s’écarter un peu des sentiers battus, comme l’explique Sylvie Fortin:

“Heureusement, les discours ne sont pas stables et il existe de nombreux discours, souvent contradictoires, qui circulent à un moment donné. [...] Dans une certaine mesure, le développement des pratiques de pleine conscience offre un discours marginal car elles favorisent la perception et le ressenti comme base de nos pensées et de nos actions.” (1)

Prendre soin, c’est aussi interroger la notion au quotidien. Non pas en cédant à une quelconque mode du “bien-être” mais bien en le revendiquant comme l’endroit d’une possible résistance. Développer ses habitudes, danser pour le plaisir, faire ce qu’on connaît le mieux, ce dont on a envie et besoin, construire ses rituels. Et affirmer cette singularité de la pratique au quotidien (2).

(1) Sylvie Fortin, “Corporal practices and health promotion”, Cena , n°20, 16-27, 2016, p. 19. Traduction personnelle.

(2) Inspiré du projet de recherche pratique mené avec Mariam Faquir sur le travail au quotidien et l'improvisation à l’L (Bruxelles) /https://www.llrecherche.be/agathe-dumont-mariam-faquir/

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